(31 octobre et 1er novembre 2017 - Toussaint A)

 


"J'ai vu une foule immense ",
disait l'Apocalypse, " qu'on ne pouvait compter, une foule de toutes nations, races, peuples et langues. " Mais moi, je me suis dit, qu'il fallait être bien haut, à la hauteur de Dieu, pour voir une pareille foule. Ou peut-être de Rome. II est vrai qu'aujourd'hui on en canonise tant de saintes et de saints, comme jamais autrefois. Mais moi, à mon niveau, à mon petit niveau, avec les pieds sur terre, ce n'est pas ce que je vois. Moi, je vois des cimetières qui sont plus remplis que nos églises qui se vident.
Et l'Ecriture ajoute : "Ils se tenaient debout."

"J'ai vu une foule immense."
Et moi aussi, je vois une foule qu'on ne compte plus, une foule qui ne compte plus. Mais ce n'est pas la même. Je vois ces foules d'hommes, de femmes et d'enfants, qui s'enfuient, que l'on chasse d'une frontière à l'autre, qui sont de trop sur terre. Je vois les immigrés que l'on traque chez nous, que l'on rejette ailleurs. Je vois la multitude de tous ceux qui mendient un peu de riz pour survivre, quand ils en ont la force. Je vois les sans-travail, je vois les sans-abri. Et les enfants martyrs.
La terre comme un cimetière. Ils y sont allongés.

J'ai vu cette foule immense.
J'ai cru y reconnaître un visage familier. Et une voix qui me disait : "Regarde autour de moi." Et j'ai vu, j'ai bien vu. Ceux et celles qui étaient assez pauvres pour prendre le parti des petits. Et puis les doux aussi, dont la présence seule est comme un réconfort. Ceux et celles qui savent ce que c'est que pleurer et savent consoler. Les miséricordieux qui ignorent la rancune. Ceux et celles qui veulent la justice et la paix. J'ai compris qu'ils étaient les vrais saints d'aujourd'hui, même hors de nos églises.
Je les ai regardés. Ils se tenaient debout.